Troubles des conduites alimentaires : mieux comprendre pour agir sans délai 

Troubles des conduites alimentaires : mieux comprendre pour agir sans délai 
Troubles des conduites alimentaires : mieux comprendre pour agir sans délai 

Les troubles des conduites alimentaires (TCA) font aujourd’hui parties des préoccupations de santé publique en raison de leur incidence croissante, des risques induits sur la santé physique et psychique des personnes concernées et de leur famille. 

Cet article apporte un éclairage sur les connaissances actuelles de ces troubles. Comment mieux comprendre les mécanismes à l’origine des TCA ? Pourquoi est-il important de les prendre en charge précocement ? A qui s’adresser ? Hélène Buyscchaert, diététicienne du réseau Bélénos-Enjeux-Nutrition, spécialisée dans les troubles des conduites alimentaires, nous livre ses conseils pour mieux comprendre et agir. 

TCA : qu’est-ce que cela signifie ? 

Les troubles des conduites alimentaires sont caractérisés dans le manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSMV) par une déviation du comportement alimentaire par rapport à une normalité. Ces altérations concernent à la fois la fréquence mais aussi la quantité des prises alimentaires et sont susceptibles de générer des complications graves tant sur le plan somatique (engagement possible du pronostic vital) que sur le plan psychologique avec des retentissements sur la qualité de vie (familiale, sociale et parfois professionnelle ou scolaire). Les trois principaux troubles du comportement alimentaire sont : l’anorexie mentale, la boulimie et l’hyperphagie boulimie. 

Comment s’expriment ces troubles, quelles sont les différences ?  

Une personne atteinte d’anorexie mentale présente un certain nombre de caractéristiques parmi lesquelles :  

  • Une peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, alors que le poids est paradoxalement inférieur à la normale.  
  • La mise en place de stratégies pour contrôler le poids avec une privation stricte et volontaire des apports alimentaires quantitatifs / qualitatifs associée à une hyperactivité physique. Des conduites de purges comme les vomissements, le mésusage de laxatifs entraine un amaigrissement rapide et important avec des signes de dénutrition voire de carences nutritionnelles. 
  • Une altération de la perception du poids, de l’image corporelle avec un déni de la gravité de la maigreur. 

Il est parfois difficile de différencier une personne anorexique d’une personne boulimique. Ce qui permet de les distinguer est l’approche du contrôle du poids. Les personnes souffrant de boulimie ingèrent des quantités extrêmement importantes de nourriture dans un temps limité et éprouvent, lors de ces épisodes, un sentiment de perte de contrôle de la prise de nourriture. Dans le but d’éviter la prise de poids, des comportements compensatoires sont mis en œuvre tels que les vomissements provoqués, la prise de laxatifs ou de diurétiques, le jeûne, l’hyperactivité physique. L’existence de ces stratégies de contrôle permet de maintenir un poids « normal », d’être en surpoids ou en sous poids. Des oscillations pondérales importantes sont, en effet, souvent observées au cours de leur vie. Les personnes souffrant de boulimies ressentent un sentiment de honte, de dévalorisation et de culpabilité à l’inverse des personnes souffrant d’anorexie mentale où il existe davantage un sentiment de toute puissance, surtout au début de la maladie.  

L’absence de comportement compensatoire distingue les personnes souffrant d’hyperphagie boulimie, des personnes souffrant de boulimie. Le défaut de stratégie suite à l’ingestion de quantités massives de nourriture dans un temps limité, entraine une surcharge pondérale voire une obésité. Les accès hyperphagiques s’accompagnent d’une sensation pénible de distensions abdominales, de dégout, de honte et de culpabilité. 

La prévalence des TCA en France, selon les études actuelles, est de 8,4% des femmes et 2,2% des hommes. Ces troubles, en particulier l’anorexie mentale et la boulimie, concernent entre 6 à 8% des adolescents et représentent la deuxième cause de mortalité, juste après les accidents de la route selon l’assurance maladie. Selon la Fédération Française Anorexie Boulimie, plus de la moitié de ces troubles ne sont pas dépistés et n’accèdent pas aux soins. Cette prévalence est en augmentation en raison de la pression sociale vers la minceur, la valorisation de la performance et la maîtrise du corps.  

Bon à savoir 

L’adolescence est une période qui se caractérise par de multiples changements physiques, hormonaux, psychologiques qui peuvent entraîner un bouleversement de l’image corporelle associée à de l’angoisse et un sentiment de perte de contrôle. C’est également une période de construction identitaire et de personnalité, d’autonomisation pouvant entrainer de multiples questionnements anxiogènes. Ces enjeux peuvent être à l’origine de l’apparition d’un TCA. 

Les facteurs favorisant  

Bien que l’adolescence soit une période de vulnérabilité dans le développement des TCA, chacun peut être concerné. De nombreux facteurs prédisposent aux TCA : une vulnérabilité génétique, une susceptibilité des personnalités perfectionnistes, des relations intrafamiliales favorisantes, des facteurs socioculturels…Etc. Un certain nombre d’éléments peuvent être déclencheurs : l’adolescence, la mésestime de soi, l’insatisfaction corporelle, les restrictions alimentaires. Les régimes, bien que banalisés dans notre société, ne sont, en effet, pas anodins. Dans la pratique clinique, il n’est pas rare de constater qu’une grande majorité de TCA ont débuté par un régime. 

Les facteurs protecteurs 

A contrario, il existe aussi des facteurs protecteurs au développement des troubles des conduites alimentaires :  

  • L’appréciation de son corps et le plaisir à en prendre soin. 
  • Le sentiment d’autonomie pour mettre à distance la pression sociale. 
  • La conscience et la régulation des sensations et des émotions. 
  • La bienveillance envers soi 
  • La facilité de communication au sein du groupe de la famille. 

Développer ces capacités est un des leviers pour agir et se prémunir de tels troubles. 

Comment repérer un TCA ? 

Les signaux d’alarme

  • Vous vous sentez préoccupé par l’alimentation, par votre silhouette et votre poids et ressentez un haut niveau de détresse psychologique ? 
  • Vous essayez de gérer votre anxiété liée à l’alimentation, à votre silhouette et votre poids en utilisant des moyens tel, l’activité physique compulsive, le surentrainement, en suivant des règles alimentaires rigides, en vérifiant souvent votre silhouette ou votre poids (balance- miroir) ? 
  • Vous ne pouvez pas vous empêcher d’adopter certains comportements avec la sensation de perdre contrôle de la nourriture ?  

Si de surcroît, vous constatez des difficultés à vous concentrer au travail, que vous vous isolez des autres et que vous ressentez des symptômes physiques comme de l’insomnie, des problèmes gastro-intestinaux, de la fatigue. Alors ne trainez pas : demander avis à votre médecin traitant. 

À qui s’adresser ? 

Si vous ou l’un de vos proches êtes concernés, Il existe une ligne d’écoute téléphonique dédiée aux Troubles des Conduites alimentaires. Des spécialistes répondent de façon anonyme à vos questions et vous apportent des informations sur les conduites à tenir, les stratégies de prise en charge, sur les soins disponibles dans votre région. Ce numéro est le 0 810 037 037, du lundi au vendredi de 16h00 à 18h00. 

Que faire pour s’en sortir ?  

Sortir des troubles alimentaires n’est pas une mince affaire. Reprendre une alimentation suffisante quand on souffre d’anorexie ou encore arrêter de « trop manger » quand on souffre d’hyperphagie boulimie n’est pas une simple question de volonté. Tout comme les autres maladies, on ne choisit pas de souffrir d’un TCA ! Ces troubles sont associés à un malaise psychique et nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire. Des soins spécifiques aideront les personnes atteintes de TCA à gérer leur stress, leurs émotions, retrouver confiance, estime de soi et plaisir de cuisiner et de manger dans la convivialité…  

Un long parcours de soin pour restaurer sa santé et sa qualité de vie. 


 

Cet article a été rédigé par KERIALIS, en collaboration avec notre partenaire Bélénos Enjeux Nutrition.  

Bélénos Enjeux Nutrition est une association créée en 2004. Face à l’augmentation croissante des maladies liées à la malnutrition et à la sédentarité, l’association a tissé un réseau multidisciplinaire pour développer des programmes de formation et de prévention à destination des professionnels et du grand public.